Une lecture alchimique d’In girum imus nocte et consumimur igni / 3

3. Analogies

Si, à présent, nous rapportons analogiquement les différentes phases de l’Œuvre au film testamentaire de Debord, on constatera un certain nombre de concordances signifiantes.

Il faut d’abord noter cette déclaration liminaire : « On m’avait parfois reproché, mais à tort je crois, de faire des films difficiles : je vais pour finir en faire un. » Mais Debord ne dit rien de cette difficulté particulière que nous nous proposons d’examiner ici.

Commençons par le titre : In girum imus nocte et consumimur igni. Debord en indique explicitement, dans une Note, la circularité qu’il met en rapport avec la proposition conclusive de son film : « À reprendre depuis le début. » qui, dit-il, « doit être comprise dans tous les sens du verbe “comprendre” ». Il place ainsi son œuvre tout entière sous le signe de l’Ouroboros. Il précisera par la suite que : « Tout le film […] est bâti sur le thème de l’eau. […] [L]’eau : c’est le temps » ; et qu’« [i]l y a secondairement, le thème du feu ; de l’éclat de l’instant : c’est la révolution […] la négation dans sa nuit, le Diable, la bataille, […]. » — il convient de souligner le terme de : révolution : le Feu de roue. Ce sont tous des thèmes qui peuvent être rapportés à l’alchimie, plus précisément à ce qu’il est convenu de nommer la voie humide, où il est de première importance, pour l’Artiste, de savoir maîtriser son Feu s’il veut aboutir au résultat final qui est de produire la Pierre des Philosophes.

Dom Pernety écrit dans son Dictionnaire Mytho-hermétique que : « Le nom de Philosophe a été donné de tout temps à ceux qui sont véritablement instruits des procédés du grand œuvre […]. » On signalera à ce propos la citation que fait Debord, dans son film, des Visiteurs du Soir où Garance apostrophe Lacenaire et sa bande en ces termes : « En somme, si je comprends bien, tous autant que vous êtes, vous êtes des philosophes ! » ; ce à quoi Lacenaire répond : « Pourquoi pas ? » et Garance de poursuivre : « Ah ben ! elle gaie, elle est jolie, elle est propre la philosophie ! » On remarquera le qualificatif de gaie donné à la philosophie : la gaya scienza — et l’on sait que l’Artiste est un Philosophe par le Feu.

(À suivre)