vendredi 7 septembre 2012

Debord, Muray et Sollers sont sur un bateau… / 3



L’étrange vie de Guy Debord commence ainsi : « Peu importe ce qui va se dire, pendant un certain temps, de Guy Debord. Les discours à son sujet sont déjà nombreux et intéressés, contradictoires ; ce n’est qu’un début, les gloses et les biographies se succèderont […]. » On ne pouvait mieux dire ; mais c’est précisément ce qui est en train de finir ; et les bavards professionnels — et « intéressés » comme Sollers — vont être contraint de se taire. Un certain nombre d’ouvrages « sérieux » sont parus sur le sujet qui démonétisent les pieux hagiographes qui tenaient jusqu’à présent le haut du pavé — qui de ce fait va leur revenir dans la gueule — ; ainsi que des témoignages de première main qui l’éclairent de l’intérieur.

Comme l’écrit imprudemment le révérant Sollers qui se flatte de savoir lire : « Debord est de mieux en mieux publié (certains ont raison de s’en inquiéter ou de s’en plaindre) […] » Il ne croit pas si bien dire. Il ne semble pas mesurer non plus toute l’ironie de la citation hégélienne qu’il donne ensuite : « “À ce dont un esprit se satisfait, on mesure la grandeur de sa perte.” » — autrement traduite : à ce dont l’esprit se contente, on mesure l’étendue de sa perte.

Le reste de l’article est dans la manière « classique » de Sollers : une rhapsodie mal ficelée de considérations  pédantes destinées à glorifier une fois encore Debord. Tout y passe dans un festival de lieux communs inlassablement ressassé. Les : « […] personne n’aura autant travaillé que l’auteur de l’inscription célèbre “Ne travaillez jamais !” » ; la « lucidité politique de Debord qui est la même chose que sa passion poétique (Lautréamont, Cravan) » ; les : « “la formule pour renverser le monde, nous ne l’avons pas cherchée dans les livres, mais en errant.” » ; la « “dérive à grande journée” » ; la « “Poésie : oui, mais dans la vie.” » ; les « Œuvres cinématographiques complètes, un des plus beaux livre du XXe siècle » ; les : « “Je me flatte de faire un film avec n’importe quoi ; […] » ; la charge de « la “brigade légère” » : tagada, tagada ; l’« “existence obscure et insaisissable” » etc. N’en jetez plus la barque est pleine !


(À suivre)

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