On sait que les lettristes internationaux sont
allés se « faire influencer » en Belgique où ils ont collaboré avec
les lèvres-nudistes. Ceux-ci les ont accueillis dans leur revue, notamment avec
l’important Mode d’emploi du détournement de Debord et Wolman qui a été publié
dans le n° 8 des Lèvres nues (mai
1956). On a moins remarqué que celui-ci « précède immédiatement la
“Messagère”, l’un des textes les plus troublant de Nougé, daté de 1927 » ;
et que « l’année précédente dans son n° 6, la première contribution de
Debord à la même revue (“Introduction à une critique de la géographie urbaine”)
est suivie à deux pages d’écart, par “Un miroir exemplaire de Maupassant”,
attribué à un certain Ganchina”, séquence qui constitue si l’on ose dire l’aboutissement
dans le domaine “poétique” de tout le travail de Nougé, depuis alors trente
ans. / On rappellera enfin, sans qu’il soit question de conclure, que Mariën a
placé respectivement ces deux textes, pour le premier en ouverture, et pour le
second en clôture de L’Expérience
continue, où il rassemblait en 1967 la poésie quasi complète de Nougé. /
Agrégés à d’autres, ces faits tissent dans le secret des aubes (fussent-elles
secrètes, ou navrantes), le filigrane d’une histoire — dont le récit se fait
attendre. »
Les citations qui précèdent sont tirées de la
contribution d’Yves di Manno à un numéro spécial de la revue Europe sur Les Surréalistes Belges, intitulée : La révolution la nuit, Nougé « précurseur »
de Debord. Voici encore quelques extraits du même article : « […]
si je propose ici, à gros traits, de reconnaître en Nougé l’un des rares
précurseurs de Debord — au plan de la méthode comme de la visée — cela n’exclut
bien sûr ni la singularité respective des deux hommes, ni la différence de
leurs points d’ancrage et de leur projets initiaux ». Après avoir écrit :
« Ce qu’il importe de souligner, c’est qu’à l’époque la plus active de son
entrepris (entre 1925 et 1935, essentiellement), entouré de complices qu’il s’est
choisi, Nougé privilégie une méthode visant à une forme d’intervention
“directe” dans la réalité : envoi de tracts, perturbation de manifestations
de l’avant-garde “officielle”, transfiguration
de panneaux ou de catalogues publicitaires… » ; il ajoute : « À
l’initial de son périple Guy Debord ne se trouve pas dans une posture
essentiellement différente. Il pratique lui aussi une stratégie souterraine et
cette forme de critique active pour laquelle il inventera le terme de détournement. Les livraisons du bulletin
Potlatch, de 1954 à 1957, ne sont pas
davantage destinées à la vente qu’en 1924 les tracts de Correspondance. Et leur
style souverain — ce mélange d’opprobre et de dérision, de confession dédaigneuse
et de “lyrisme” froid : de la gifle à la laideur autant qu’à la soumission
— n’est pas sans renvoyer, consciemment ou non, à celui qu(‘avait adopté Nougé,
dès ses premières interventions. Détail à mon sens hautement révélateur, dans
le n° 16 de Potlatch (en janvier
1955), Debord met d’ailleurs en exergue à son éditorial une citation de La Conférence de Charleroi : sauf
erreur, c’est la seule fois dans l’histoire du bulletin qu’un contemporain est
ainsi distingué — ce qui constitue, bien loin de tout “honneur”, une indéniable
marque d’estime. Et de complicité. / […] / Quand on se souvient que c’est au
fil de [la] première série des Lèvres
nues que Mariën entreprit la publication de l’œuvre alors largement inédite
de Nougé, où Debord n’a pu manquer de la découvrir, on ne peut s’empêcher de
songer que cette relation muette
(négligée par les “spécialistes” respectifs des situationnistes et du surréalisme)
constitue sans doute l’un des foyers d’incandescence majeurs de l’histoire
secrète de la pensée, au cours des décennies récentes. » On ne saurait
mieux dire. Poursuivons : « Il y a là aussi un paradoxe : que l’auteur
de In girum imus nocte et consumimur igni
ait fini par obtenir, sans œuvre à proprement dite “littéraire”, une manière de
reconnaissance dans ce domaine, alors que Nougé, plus ancré malgré tout dans
cette sphère, n’est aujourd’hui encore reconnu, ou tout simplement connu, que d’une
poignée de lecteurs dispersés, formeraient-ils à leur insu une manière de
confrérie muette. »
(À suivre)
Je n'entends plus Alex. J'espère qu'il n'est pas malade.
RépondreSupprimerJe vous manque à ce point, seriez-vous masochiste ?
RépondreSupprimerVos billets de compilation d'écrits guère pertinents sont toujours aussi peu intéressants car Nougé est bien connu des lecteurs des "Lèvres nues" et de Debord (voir le volume "Quarto" et sa "Correspondance").
Enfoncez des portes ouvertes, c'est votre seule activité, bien inutile : vous croyez pouvoir à chaque fois démontrer que Debord n'a jamais rien inventé et qu'il a tout piqué à d'autres ; cela prouve seulement votre ignorance crasse de l'art au XXe siècle.