mardi 13 mars 2012

Vie et mort de Guy Debord – Errata / 3

P. 241 « Au début de l’année 1966, les Strasbourgeois de l’IS font part à leurs camarades d’une surprenante ouverture stratégique. Il devient possible de s’emparer sans coup férir… de l’Union nationales des étudiants de France. Certains de leurs amis sont sur le point d’en prendre le contrôle, en jouant habilement sur l’apathie et le désintérêt des étudiants. [...] »


Les situationnistes Strasbourgeois, à savoir : Khayati*, Garnault, Théo Frey et sa sœur Edith, tous anciens élèves de Henri Lefebvre, n'ont eu aucunes relations** avec les étudiants qui devaient s'emparer de l'AFGES le 14 mai 1966 avant l'été de cette même année. Ils n'étaient donc pas les amis de ceux-ci et ils ignoraient tout de leurs intentions, contrairement à ce que Christophe Bourseiller laisse entendre.

Jusqu'à présent, c'est le compte rendu du n°11 d'I.S. qui reste la relation la plus fidèle du « scandale de Strasbourg » bien qu'elle soit elle-même lacunaire. C’est aussi celle que suit Pascal Dumontier dans son livre Les situationnistes et Mai 68. S'il est vrai que « […] quelques étudiants de Strasbourg vinrent nous trouver [l’I.S.] pendant l’été de 1966, et nous firent savoir que six de leurs amis — et non eux-mêmes — venaient d’être élus comme direction de l’Association étudiante locale (A.F.G.E.S), sans programme d’aucune sorte […]. », ce n'est là qu'une partie de la vérité.

André Bertrand précise à ce propos : « J'étais en 1965/66 à Toulouse. J'y fréquentais entre autres Sean Wilder, un étudiant américain rencontré l'année précédente à Strasbourg. J'avais écrit à Debord dès 1965. Sean qui était abonné à I.S., avait été sollicité pour traduire en américain le texte sur les révoltes de Los Angeles (Cf. Correspondance, III, 12 nov. 65.). En juin 66, Sean et moi rencontrons Debord à Paris ; dans une lettre écrite fin mai, j'avais fait part à celui-ci de la prise de pouvoir de la section strasbourgeoise de l'UNEF par certains camarades — avec lesquels j'étais toujours en étroit contact. C'est lors de cette entrevue dans un café de la Place de la Contrescarpe, que se scelle, par mon intermédiaire, l'accord très informel entre le bureau de l'AFGES et l'I.S. ; et que se mettent en place les prémisses du scandale de Strasbourg ; Debord avait, à ce moment-là, déjà pensé au titre téléscopique de « De la misère... » et suggéré les grandes lignes du contenu de celle-ci. »


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* Une anecdote amusante qui a échappée à Bourseiller. Khayati et ses acolytes avaient l'intention, au début des années 60, d'ouvrir un maquis armé dans les Vosges pour soutenir l'insurrection algérienne ! C’est du moins ce qu’affirme Henri Lefebvre dans un entretien reproduit dans le catalogue : Figures de la négation, Avant-gardes du dépassement de l’art qui faisait suite à l’exposition : Après la fin de l'art (1945-2003), présentée du 22 novembre 2003 au 22 février 2004 au Musée d'Art Moderne de Saint-Étienne Métropole ; et organisée un spécialiste : Yan Ciret.

** « On se croisait au bar du Minotaure [cafeteria étudiante] en s'ignorant superbement. », André Bertrand dixit.


(À suivre)

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