samedi 31 mars 2012

L’I.S., Image et Vérité / 2

Dans une lettre de Debord à Jorn, de 1957, on trouve, entre parenthèses, la déclaration suivante : « Il faut créer tout de suite une nouvelle légende à notre propos. » On peut y voir comme un écho de ce qu’il écrivait en réponse à une proposition d’Ivan Chtchteglov, au plus fort de leur relation fraternelle : « Eh oui très bonne idée — les lettristes pouvoir occulte, comme le Ku Klux Klan, l’œil de Moscou, l’Intelligence Service… » On notera : « Intelligence Service » ; on a ici, de façon allusive, la première mention, et sans doute l’origine du nom de la future Internationale Situationniste. Toujours à Ivan Chtchteglov, Debord déclarait dans élan enthousiasme, vouloir : « Créer un cycle épique qui laisserait loin derrière en qualité Homère ou la Table Ronde. » Et encore au même : « D’autre part la montagne Ste Geneviève se révèle au long de l’histoire le haut lieu de toutes les conspirations. Au XIXe siècle le quartier le plus solidement insurrectionnel de Paris : Repaire des Sociétés Secrètes extrémistes d’alors […]. / […] L’aura nous entoure certainement. Quelque chose VA SE PASSER»

On voit que le Debord matérialiste et rationaliste, qui plus tard moquerait la chose chez Breton et les derniers surréalistes, n’était pas tout à fait hostile à un certain parfum ésotérisme quand il s’agissait d’entourer de mystère et de promotionner en même temps ce qui allait devenir l’I.S. Évidemment, comme il fallait se démarquer d’Isou avec lequel on avait rompu, il était nécessaire d’adopter un ton et un langage qui rompe avec la phraséologie du maître congédié ; c’est ainsi que Debord devait opter pour une terminologie marxiste (voire léniniste) plus martiale parallèlement à une terminologie maison destiné à remplacer le jargon isouien périmé.


(À suivre)

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