Revenons à cette « fameuse » Déclaration de Stockholm. Eric brun
écrit : « La critique très “Cobra” du “théoricisme” au nom de
“l’expérimental” comme cette manière d’opposer une tendance “nordique” à une
tendance “latine” sont au cœur même de la Déclaration
de Stockholm de 1962. Cette déclaration reproche en particulier à l’I.S.
d’avoir reprise une conception de l’organisation jugée “ultra-rigide” et
propose alors une approche alternative de la “philosophie situationniste”, qui
se revendique de Kierkegaard notamment (référence par ailleurs mise en avant
par Jorn dans Signes gravés…) et
selon laquelle l’action doit résulter de l’émotion et la théorie de la pratique. »
Il poursuit : « La déclaration explique également – en s’appuyant sur
la “théorie complémentaire” de Niels Bohr selon laquelle on ne peut décrire
simultanément une position et un mouvement – que lorsque Debord voit les choses
en termes de “positions”, la perspective scandinave est tout à fait différente,
elle juge les situations en fonction du mouvement et de la mobilité. Ici, on
peut voir un écho au texte antérieur de Jorn “Sur l’antisitutation
d’Amsterdam”, rédigé en 1960 (Jorn y développe une critique du jugement de
valeur d’une personne qui ne prendrait en compte que “l’attitude purement
spatiale”, en faveur d’un jugement qui prendrait en compte à la fois la
position et “le temps qui modifie tout”). […] De telles conceptions sont
récusées par Debord. » ; et il conclut par : « S’il reste
difficile dans le cadre de cette étude nécessairement “franco-centrée” de
percevoir tout à fait le rôle de Jorn dans la “crise” de 1962 et dans la
formation d’une Seconde Internationale situationniste (aux conception en tout
cas très “jorniennes”), il apparaît que l’unité des premiers temps […] a laissé
place aux divergences autour de la question de l’art et de la légitimité de la
production artistique. »
Il dommage qu’Eric Brun s’abrite derrière le
cadre « nécessairement “franco-centrée” » de son étude — pourquoi,
s’agissant d’une Internationale, serait-il d’ailleurs
« franco-centrée » ? — parce cette « crise » de 1962
est cruciale ; et il est dont nécessaire de l’analyser. En effet,
c’est après la « purge » de 1962 que l’I.S. sous l’impulsion de
Debord — et avec l’accord tacite de Jorn, c’est vrai — va s’engager dans ce qui
s’avérera être une impasse.
(À suivre)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire