Précédant le portrait de Debord à
quarante-cinq ans, une autre photographie de lui où on le voit à dix-neuf ans.
De la même manière que celui-là renvoie au « miroir glacé de
l’écran » sur lequel s’ouvre le film, après le congé donné à un monde
« où tout est devenu si mauvais » et qu’ait été annoncé que l’œuvre ne traitera que d’un sujet
unique : Debord lui-même, celle-ci renvoie au début de(s) l’opération(s) : au désordre de la
jeunesse dans la nuit de
Saint-Germain-des-Prés*.
De ces années de formation, deux autres
figures se détachent, celle d’Ivan Chtcheglov, le « frère jumeau » perdu,
à qui Debord rend l’hommage des braves (« Personne le valait cette
année-là. ») ; et Éliane Papaï, la « petite amoureuse », (« Celle
qui était la plus belle cette année-là. »), perdue elle aussi, qui revient à plusieurs reprises dans le
film : « “Nous tournons en rond dans la nuit, et nous sommes dévorés
par le feu”. La même revient. »
— celle qui a sans doute été à l’origine de sa tentative de suicide
« ratée réussie ».
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Il convient de s’attarder sur ces
« enfants perdus » que Debord embarque avec lui sur le
« Vaisseau des Morts » pour le dernier voyage ; jusqu’à cette
« grande étendue d’au vide » sur laquelle se clôt le film. On pourrait
s’étonner d’y retrouver Andreas Baader et Gudrun Ensslin mais ce sont des combattants
— et la Mort égalise toute chose. Passée cette « grande étendue d’eau
vide », sa mission accomplie, le « Vaisseau des Morts », comme
la barque du soleil couchant, entreprend son voyage nocturne pour reparaître de
l’autre côté de l’horizon — In girum.
Le film peut alors commencer. Il débute par un prologue. La « bouche d’ombre »
parle : Debord juge et condamne cette « terre gaste » que rien ne
semble devoir rédimer — pas même l’œuvre
destinée elle aussi à échouer.
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* Debord utilise plusieurs extraits de La Nuit de Saint-Germain-des-Près de Bob
Swaim. Le film est une adaptation de roman éponyme de Léo Malet dont le cadre
se situe dans le Paris existentialiste.
(À suivre)
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