mercredi 28 août 2013

Lectures – Autour de Hölderlin






Il y a quelque temps les prolifiques éditions Allia publiaient Vie, Poésie et Folie de Friedrich Hölderlin* de Wilhelm Waiblinger. Il s’agit d’un témoignage sur la « folie » du poète qui mourra à Tübingen, après plus de trente ans de réclusion, dans la chambre qu’il occupait chez le menuisier Zimmer. Si c’est certainement une bonne chose d’avoir donné une traduction de ce texte, il n’en reste pas moins que ce qui est présenté comme un témoignage, indépendamment du fait qu’il est entaché d’erreurs, est sujet à caution. Il manque donc à cette édition une Notice qui situe les conditions et les raisons pour lesquelles Waiblinger a écrit ce « témoignage ». Avec l’aide de Pierre Bertaux à qui l’on doit l’indispensable biographie intitulée : Hölderlin ou le temps d’un poète**, je me propose de pallier cette regrettable lacune.



Pierre Bertaux écrit de Waiblinger qu’il « a réussi une carrière d’écrivain romantique aux frais de Hölderlin et de sa réputation » et qu’« [i]l a en quelque sorte parasité Hölderlin ». Il ajoute : « Mais comme son témoignage est l’un des très rares qui nous restent, qu’il donne de nombreux détails, il importe de l’exploiter à fond, avec la prudence requise. »



« Waiblinger a passé cinq ans, de 1822 à 1826, à Tübingen comme pensionnaire du Stift. Il s’en est fait mettre à la porte pour “négligence dans ses études, désordre dans sa vie privée et inconduite”. Il n’a […] rencontré Hölderlin que pendant les dix-huit premiers mois de son séjour, et l’a vu moins d’une dizaine de fois. / Pourquoi a-t-il cessé de la voir ? Parce qu’il en avait tiré tout ce qu’il en attendait : la substance d’un roman grâce auquel il comptait se rendre célèbre, et accessoirement une relativement brève biographie de Hölderlin, qui contient nombre d’erreurs. » Pierre Bertaux poursuit : « […] Impécunieux, Waiblinger [qui veux aller vivre à Rome] à l’idée d’offrir à un éditeur allemand, naturellement moyennant finance, une “Vie de Hölderlin”. Il l’appâte en promettant une description savoureuse de la “folie de Hölderlin”. […] / Voilà dans quelles conditions, après avoir vu Hölderlin huit ou neuf fois et avec un recul de cinq ans, sans autre document que ses souvenirs, pressé par le besoin et poussé par le soucis d’écrire un ouvrage qui se vende, Waiblinger rédige l’opuscule qui servira de base a tout ce qui s’est dit et se dit encore sur la folie de Hölderlin. / […] / C’est à partir du texte de Waiblinger que la légende romantique du “poète frappé de démence” va se répandre, s’amplifier, s’orner, faire figure de vérité historique jamais remise en cause. »



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* Wilhelm Waiblinger, Vie, Poésie et Folie de Freidrich Hölderin, Allia (2010).



** Pierre Bertaux, Hölderlin ou le temps d’un poète, Gallimard (1983).

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