samedi 8 décembre 2012

Lectures – L’Exil intérieur



« Je suis convaincu que, lorsqu’on fera l’histoire de la maladie mentale, on parviendra éventuellement à prouver que les sociétés qui, comme l’Athènes préplatonicienne, ont eu un fonctionnement quasi optimum n’ont connu que des désordres ethniques de type bénin, telle l’hystérie, alors que les sociétés à leur déclin : Sparte à partir du IVe siècle avant Jésus-Christ, Rome à l’époque de la pire décadence, ont souffert de psychoses ethniques graves, telle la schizophrénie. / « Une chose est tout au moins certaine : le pourcentage croissant des névroses, des psychoses dans les systèmes sociaux condamnés à disparaître est parmi les faits historiques les plus méconnus (…). / Notre société devra cesser de favoriser par tous les moyens le développement de la schizophrénie de masse, ou elle cessera d’être. S’il est encore temps de recouvrer notre santé mentale, l’échéance est proche. Il nous faudra regagner notre humanité dans le cadre de la réalité, ou périr. » / Cette mise en garde de l’ethno-psychiatre Georges Devereux mérite attention. Nous ne partageons pas cependant cette vision apocalyptique de l’effondrement  de l’Occident contemporain dans la schizophrénie. Nous pensons plutôt que l’homme de la modernité, schizoïde et morcelé, va s’étendre planétairement et que le processus de modernisation et de normalisation encours n’en est qu’à ses débuts ; les rêveries apocalyptiques, révolutionnaristes ou progressistes / humanistes, ne sont et ne seront jamais plus que le remède à la dépression plus ou moins ressentie par tel ou tel individu ou par telle ou telle partie du corps social.

Roland Jaccard, L’Exil intérieur, Schizoïdie et civilisation, Puf / perspectives Critiques.

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