dimanche 2 décembre 2012

Guy Debord et l’Internationale situationniste – Sociologie d’une avant-garde « totale » / Commentaire 10



Revenons à cette « fameuse » Déclaration de Stockholm. Eric brun écrit : « La critique très “Cobra” du “théoricisme” au nom de “l’expérimental” comme cette manière d’opposer une tendance “nordique” à une tendance “latine” sont au cœur même de la Déclaration de Stockholm de 1962. Cette déclaration reproche en particulier à l’I.S. d’avoir reprise une conception de l’organisation jugée “ultra-rigide” et propose alors une approche alternative de la “philosophie situationniste”, qui se revendique de Kierkegaard notamment (référence par ailleurs mise en avant par Jorn dans Signes gravés…) et selon laquelle l’action doit résulter de l’émotion et la théorie de la pratique. » Il poursuit : « La déclaration explique également – en s’appuyant sur la “théorie complémentaire” de Niels Bohr selon laquelle on ne peut décrire simultanément une position et un mouvement – que lorsque Debord voit les choses en termes de “positions”, la perspective scandinave est tout à fait différente, elle juge les situations en fonction du mouvement et de la mobilité. Ici, on peut voir un écho au texte antérieur de Jorn “Sur l’antisitutation d’Amsterdam”, rédigé en 1960 (Jorn y développe une critique du jugement de valeur d’une personne qui ne prendrait en compte que “l’attitude purement spatiale”, en faveur d’un jugement qui prendrait en compte à la fois la position et “le temps qui modifie tout”). […] De telles conceptions sont récusées par Debord. » ; et il conclut par : « S’il reste difficile dans le cadre de cette étude nécessairement “franco-centrée” de percevoir tout à fait le rôle de Jorn dans la “crise” de 1962 et dans la formation d’une Seconde Internationale situationniste (aux conception en tout cas très “jorniennes”), il apparaît que l’unité des premiers temps […] a laissé place aux divergences autour de la question de l’art et de la légitimité de la production artistique. »

Il dommage qu’Eric Brun s’abrite derrière le cadre « nécessairement “franco-centrée” » de son étude — pourquoi, s’agissant d’une Internationale, serait-il d’ailleurs « franco-centrée » ? — parce cette « crise » de 1962 est cruciale ; et il est dont nécessaire de l’analyser. En effet, c’est après la « purge » de 1962 que l’I.S. sous l’impulsion de Debord — et avec l’accord tacite de Jorn, c’est vrai — va s’engager dans ce qui s’avérera être une impasse.

(À suivre)

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