samedi 11 août 2012

Documents Post-situationnistes / 4



Considérations sur la Téléologie moderne ; ou : L’Édifiante histoire des OTistes racontée aux enfants du siècle en « largonji » par un ex-compagnon de « cellule », le pop-philosophe et badiousien repenti Mehdi Belhaj Kacem.

Ces extraits ont été postés sur feu le debord of directors par un pseudo-Aristote ; la totalité du message se trouve à l’adresse suivante :




[...]

Presque au même moment, mais en France, la Bibliothèque des Émeutes, refusant tout contact avec l'industrie informationnelle et essayant de prendre la relève de la radicalité situationniste, écrit dans le silence général que « vol, viol, meurtre sont des délits d'opinions ». Leur projet n'était rien d'autre, avec l'outillage d'un hégélianisme aussi bizarrement assimilé que chez Stirner, de « finir l'humanité », au sens le plus factuel du terme. Pendant des années, hormis le développement de leur théorie appuyé sur le recensement de toutes les émeutes et insurrections du monde, cette radicalité ne fut jamais guère que pétition de principe. Appeler à l'insurrection, au massacre général, sans produire la moindre subversion tangible ? Mais justement : attendue la complète absence de résultats concrets, dans l'asphyxie insupportable de la consensualité culturelle française, la question qu'involontairement ils posent est celle du topos de l'extrémisme : est-il condamné à l'u-topie ? Se place-t-il cruellement dans la réalité la plus extrême et pesante de leur échec, ou dans la virtualité métaphysique d'une négativité absolue constamment postulée ? Dans la complicité des deux, et leur incapacité à les penser au-delà de leur compulsion à insulter et menacer de mort tout ce qui existe (l'auteur en sait quelque chose ; une théorie des jeux illustré de couteaux divers dans leur dernier numéro lui était probablement destinée) ? Malgré leur mépris pour la littérature, n'est-ce pas d'une déchéance littéraire qu'ils furent sanctionnés, — au sens où nous ne pouvons plus lire leurs textes en vertu d'une quelconque réalité historique déterminable, mais bien dans l'interrogation des limites existant entre simulacre et réel, virtualité de la guerre et factualité du meurtre, déterminiscence de l'ennemi et spectralisation du rapport social qui permettrait la lutte ? Avons-nous là un jeu de simulation jonglant avec la menace de mort concrète, prête à la donner bientôt, mais n'ayant produit que le témoignage poétique d'une métaphysique époquale de l'économie de la mort ?

[...]

Si le militantisme utérin des « féministes » d'aujourd'hui est l'hypocrisie odieuse de l'extension cancéreuse de la publicité et de l'information comme seul rapport social et humain, ce militantisme queutard de la permanente « pénétration », du « je t'encule » comme figure de style, est assurément beaucoup plus odieux encore : « […] et vous, pro-situs de mes deux, qui faites de la diffamation un tic ulcéreux, de l'injure une rhétorique impuissante, confinés dans la cocotte minute de vos trente-trois lecteurs cons,- vous, les éditorialistes miteux, à l'estomac aigri par la mauvaise digestion de Debord, qui vous donne l'excuse, en en faisant un Maurras de Gauche, de ne rien pouvoir penser, pas plus de « critique sociale radicale » qu'autre chose, que l'enchaînement bande-mou de vos formules creuse,- vous qui, en me croisant dans le dix-huitième ou dans une soirée, barbichette anar et veste noire sur vos bras en jambons dodus,- vous qui menacez de me casser la gueule sans pouvoir me regarder dans les yeux ou me calomniez sans oser citer mon nom,- vous qui citez mon nom et voulez me mettre par vos insultes à votre niveau,- vous êtes des menteurs, des poseurs et des ennuyeux ; des crétins incapables de penser, des « révolutionnaires » incapable de rien changer, des idéologues qui n'ont jamais su produire la moindre pensée. »

Toute cette démesure, et ils n'ont généré que des singes ; toute cette contorsion des chantages à la culture, et ils ne produisent que des perroquets ; toute cette volonté de « subvertir », et nous n'entendons que des ventriloqués : « réaliser le dépassement du nihilisme », prononcent hardiment les bouffons, tout en prétendant « dire le réel » — mais qu'est-ce qu'époqualement la « ligne du nihilisme » sauf la limite d'achoppement de leur « réel » ? Croyant réaliser dans la « négativité » bien phrasée leur être, ils sont niés dans l'être, comme constellation de ce qui est : ce « nihilisme » qui réfléchit leur médiocrité.

[...]

Mais il ne faut pas y voir [à propos de la récupération], comme ces imbéciles d'éditorialistes, n°1 de la récupération situe, pétrifiés dans les tics de l'extase debordienne, comme les habitants de Pompéi par la lave, prêts à dénoncer partout la « récupération », une faiblesse, mais bien la seule chance historique de cette génération abrutie par les deux dernières décennies.

[...]

Ils instituent un microtribunal, très kantien bonsaï, compétent à juger de tout ce qui existe ; ils croient que la mort de Dieu laisse un poste vacant où on peut s'installer pour juger sommairement de tout. Les manœuvres misérables et les procédés haineux de ces pseudo-révolutionnaires, où ils pataugent sans fin, sont l'identité entre cette théorie et les corps qui la pensent.

Plus encore que dans ses tentatives de succession et de relève, des plus rigoureusement fidèles à son projet « clandestin » (la Bibliothèque des Émeutes, l'Encyclopédie des Nuisances, les Archivistes de la Subversion, les Petits Pédagogues du Mal, etc.), aux récupérations si bouffonnement antinomiques au concept qu'elles récupéraient qu'elles ont recruté leurs propagateurs dans les catégories les plus parvenues de l'« industrie de la consolation », divertissement et information, journalisme « branché » (à la synchronie, au rituel ennuyeux des « émissions » en temps réel) et idéologues de l'incapacité à penser, comme autant de figures de la résolution dialectique par transparence (et la dialectique prise dans clôture politico-époquale de la synchronie, se réalise synchroniquement et résout toutes les anti-thèses dans ces syn-thèses vides que sont les cadavres trans-parents de l'information) — davantage, donc, que dans ces héritages, l'échec politique était déjà l'échec poétique de l'idéologie situationniste.

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