Il faut revenir sur ce mot d’ordre des
Conseils : « Les Conseils ouvriers, partout. », proclamait une
des Directives de Debord — qui resta
sans suite comme les autres. « La révolution des conseils n’a pas répondu
à l’appel de Mai 68 ? À qui la faute si les exploités n’ont pas su
entendre les trois coups ! On leur avait pourtant demandé de rester à
l’écoute ! » peut ironiser Louis Janover. De fait les appels
enflammés lancés par le Conseil pour le maintien des occupations (C.M.D.O.) — le très situationniste
Conseil de la rue d’Ulm — feront l’effet d’un pétard mouillé. Dans l’Histoire désinvolte
du situationnisme, j’écrivais : « C’est au C.M.D.O. que l’on
doit ces « belles » affiches réalisées par les grévistes des
imprimeries (occupées), que l’on retrouvera plus tard dans les musées : FIN DE L’UNIVERSITÉ ; ABOLITION DE LA SOCIÉTÉ DE CLASSE ; OCCUPATIONS DES USINES ; LE POUVOIR AUX CONSEILS DE TRAVAILLEURS
etc. ; et qui font la fierté des collectionneurs de reliques
révolutionnaires à bon marché. Le C.M.D.O. qui était allé « au bout de son
action révolutionnaire », selon le stratège situ, n’avait donc plus qu’à
disparaître ; ce qu’il fit sans se faire prier, le 15 juin, en
s’auto-dissolvant — on n’est jamais si bien servi que par soi-même — dans la
« vague » révolutionnaire — qui, malheureusement, refluait :
c’est ainsi qu’ils se retrouvèrent sur le sable (des rues dépavées). » Mais la mode « conseilliste »
était lancée qui perdura dans les années qui suivirent*.
Pour en finir avec les Conseils, citons la remarque
de Jérôme Duwa dans Surréalistes et situationnistes,
Vies parallèles : « Dans
leur revendication en 1965 d’un “écart absolu” par rapport à la société les
surréalistes tentent sous la forme d’une exposition répondant à des principes
nouveaux de soustraire l’art à la logique de la marchandise. Si cette tentative
est désespérée, elle ne réclame certainement pas moins de talent à s’illusionner
que celle consistant à croire à la victoire des
conseils ouvriers. » On pourrait ajouter qu’avant de croire à leur
victoire encore fallait-ils qu’ils existassent ailleurs que dans la
subjectivité radicalement abusée des situationnistes.
____________________
* Je rappellerai pour mémoire le Conseil du Palais
qui occupa, au printemps de l’année 1976, les bâtiments du Palais Universitaire
de Strasbourg qui, sur son fronton arborait le fier : LUTTER ET VAINCRE en place du banal :
LITTERIS ET PATRIAE.
(À suivre)
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