Le 16 juin 1993, l’écrivain Didier Daeninckx lançait
« l’Appel des 101 » en réaction au véritable meurtre d’un garçon de
17 ans, Makomé M’Bowolé, tué d’une balle dans la tête à bout touchant, au commissariat
des Grandes-Carrières dans le XVIIe arrondissement de Paris. Peine
mort appliquée pour le vol d’un paquet de cigarettes, au cours d’un l’interrogatoire
illégal, revolver en main, par un inspecteur qui occupait utilement son temps
en attendant que le père de l’adolescent
vienne le chercher. Le texte de cet appel était lourdement significatif, et,
avec Jean-Michel Mension, nous nous y étions ralliés avec la volonté de donner
un prolongement aux mots […]. / Malgré les signatures prestigieuses qui l’accompagnait,
cet Appel des 101 ne devait pas se développer au-delà de ce communiqué qui se
voulait offensif. Ce qui démontrait, une fois de plus, l’inanité des meilleurs
sentiments humanitaires lorsque fait défaut la volonté de s’investir pleinement
dans une lutte prolongée au-delà des proclamations, comme de la qualité des
éventuels soutiens.
[…]
Un an après la mort violente de Makomé au commissariat
des Grandes-Carrières, nous avions décidé, avec Jean-Michel, de prendre le
relais de l’Appel des 101 qui n’avait vécu que le temps d’un communiqué. Il n’était
plus possible de laisser passer — sans réagir durablement — les grosses bavures
et les petites dérives. C’est à cette fin que nous avions convoqué une
conférence de presse le 6 avril 1994, jour anniversaire du jeune Makomé M’Bowolé.
[…] / Tout d’abord nous avions rédigé, pour publication dans la presse, un
manifeste destiné à faire connaître les grandes lignes de notre action. […]
Dans le même temps, nous avions pris soin de déposer les statuts de l’Observatoire
des libertés publiques comme association régie par la loi de 1901. L’objet
déclaré ne faisait pas mystère de notre projet : « Recenser toutes
les informations concernant les petites et les grandes exactions de la police. »
[…]
Malgré l’aboutissement de notre volonté de
créer cet Observatoire des libertés publiques et son bulletin Que fait la police ?, nous nous
sentions bien seuls avec mon camarade Jean-Michel. Nous savions que l’impact
suscité par notre initiative serait limité, mais nous étions surpris du peu d’intérêt
des groupes d’extrême-gauche.
[…]
Certes, nous n’étions pas nombreux mais, à
deux nous avions le sentiment de faire du bruit comme 500. […] / Au début,
faute de ressources, le tirage de Que
fait la police ? devait se limiter à 100, puis à 200 exemplaires,
adressés gratuitement aux associations et aux journaux, puis à tous ceux qui
allaient bientôt en faire la demande.
[…]
Nous n’avons jamais été inquiétés, comme les
plus pessimistes le prédisaient. Nous sommes passés de Pasqua à Debré et de
Chevénement à Vaillant, avant de connaître Sarkozy, Villepin, Alliot-marie,
Hortefeux, Guéant, Valls. Le ciel ne nous est pas tombé sur la tête.
*
Le site de Que fait la police ?
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