L’étrange
vie de Guy Debord
commence ainsi : « Peu importe
ce qui va se dire, pendant un certain temps, de Guy Debord. Les discours à
son sujet sont déjà nombreux et intéressés, contradictoires ; ce n’est
qu’un début, les gloses et les biographies se succèderont […]. » On ne
pouvait mieux dire ; mais c’est précisément ce qui est en train de finir ;
et les bavards professionnels — et « intéressés »
comme Sollers — vont être contraint de se taire. Un certain nombre d’ouvrages
« sérieux » sont parus sur le sujet qui démonétisent les pieux
hagiographes qui tenaient jusqu’à présent le haut du pavé — qui de ce fait va leur
revenir dans la gueule — ; ainsi que des témoignages de première main qui l’éclairent
de l’intérieur.
Comme l’écrit imprudemment le révérant Sollers
qui se flatte de savoir lire : « Debord
est de mieux en mieux publié (certains
ont raison de s’en inquiéter ou de s’en plaindre) […] » Il ne croit
pas si bien dire. Il ne semble pas mesurer non plus toute l’ironie de la
citation hégélienne qu’il donne ensuite : « “À ce dont un esprit se satisfait, on mesure la grandeur de sa perte.” »
— autrement traduite : à ce dont l’esprit se contente, on mesure l’étendue
de sa perte.
Le reste de l’article est dans la manière « classique »
de Sollers : une rhapsodie mal ficelée de considérations
pédantes destinées à glorifier une fois encore Debord. Tout y passe dans un festival
de lieux communs inlassablement ressassé. Les : « […] personne n’aura autant travaillé que l’auteur de l’inscription célèbre “Ne
travaillez jamais !” » ; la « lucidité politique de Debord qui est la même chose que sa passion
poétique (Lautréamont, Cravan) » ; les : « “la formule pour renverser le monde, nous ne
l’avons pas cherchée dans les livres, mais en errant.” » ; la
« “dérive à grande journée” » ;
la « “Poésie : oui, mais dans
la vie.” » ; les « Œuvres cinématographiques complètes, un des plus beaux livre du XXe
siècle » ; les : « “Je
me flatte de faire un film avec n’importe quoi ; […]” » ; la charge de « la “brigade légère” » :
tagada, tagada ; l’« “existence
obscure et insaisissable” » etc. N’en jetez plus la barque est
pleine !
(À suivre)
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