Avant
d’en finir, nous aussi, il faut encore mentionner la présence récurrente dans
ce roman d’un autre livre : la Vie
de Rancé de Chateaubriand, où il est question de Retz, que le narrateur
feuillette encore à la fin aux toilettes et qui n’est pas sans rapport avec
notre sujet.
Le
cardinal de Retz était petit, noir, laid ; il ne savait pas se boutonner.
*
Les
portraits du cardinal de Retz n’offrent pas ces difformités : dans le
visage il a quelque chose d’arrogant de M. de Talleyrand […].
*
Retz
écrivit la Conjuration de Fiesque ;
ce qui fit dire au cardinal de Richelieu : « Voilà un dangereux
esprit. »
*
Suspect
à Richelieu, ayant eu l’audace de mugueter ses femmes, le lovelace tortu et
batailleur fut obligé de s’enfuir.
*
Joly,
la duchesse de Nemours, La Rochefoucauld, madame de Sévigné, le président
Hénault et cent autres ont écrit du cardinal de Retz : c’est l’idole des
mauvais sujets.
*
Placé
entre la Fronde qui permettait tout, et le maître de Versailles qui ne
souffrait presque rien, le coadjuteur s’écriait : « Est-il quelqu’un
de pire que moi […]. »
*
De
l’esprit comme homme, du talent comme écrivain (et c’était là la vrai supériorité)
l’ont fait prendre pour un personnage de génie. Quant à ses actions politiques,
[…] le moindre ne nos révolutionnaire eût brisé en une heure ce qui arrêta Retz
toute sa vie.
*
Réduit
à lui-même et privé des événements, il se montra inoffensif : non qu’il
subît une de ces métamorphoses avant-coureurs du dernier départ, mais parce
qu’il avait la faculté de changer de forme comme certains scarabées vénéneux.
Privé de sens moral, cette privation était sa force. Sous le rapport de
l’argent il fut noble ; il paya les dettes de la royauté de la rue, par la
seule raison qu’il s’appelait Retz. Peu
lui importait d reste sa personne : ne s’était-il pas exposé lui-même au
coin d’un borne ? On le pressait de dicter ses aventures, et le romancier
transformé en politique les adresse à une femme sans nom […].
Les
citations qui précèdent ont été utilisées par Jean-Yves Lacroix au début du
livre pour confectionner un pseudo article du Monde : « Guy Debord, cardinal », « hommage »
anonyme paru après son suicide dont Vaneigem parlera plus loin au narrateur, lors
de leur rencontre pour affaire, en ces termes : « Au milieu des
ordures, à sa mort, un copain a fait paraitre dans Le Monde un portrait détourné de celui que Chateaubriand dresse du
cardinal de Retz dans La Vie de Rancé.
Eh bien, crois-moi, il y a plus de révélation dans ce texte écrit sur un autre,
par un autre, que dans tout ce que nos contemporains ont déballé sur lui depuis
son suicide. »
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