Considérations sur la Téléologie moderne ; ou :
L’Édifiante histoire des OTistes racontée aux enfants du siècle en « largonji »
par un ex-compagnon de « cellule », le pop-philosophe et badiousien
repenti Mehdi Belhaj Kacem.
Ces extraits ont été postés sur feu le debord of directors par un pseudo-Aristote ;
la totalité du message se trouve à l’adresse suivante :
[...]
Presque au même moment, mais en
France, la Bibliothèque des
Émeutes, refusant tout contact avec l'industrie informationnelle et
essayant de prendre la relève de la radicalité situationniste, écrit dans le
silence général que « vol, viol, meurtre sont des délits d'opinions ».
Leur projet n'était rien d'autre, avec l'outillage d'un hégélianisme aussi
bizarrement assimilé que chez Stirner, de « finir l'humanité », — au
sens le plus factuel du terme. Pendant des années, hormis le développement de
leur théorie appuyé sur le recensement de toutes les émeutes et insurrections
du monde, cette radicalité ne fut jamais guère que pétition de principe.
Appeler à l'insurrection, au massacre général, sans produire la moindre subversion
tangible ? Mais justement : attendue la complète absence de résultats
concrets, dans l'asphyxie insupportable de la consensualité culturelle
française, la question qu'involontairement ils posent est celle du topos de l'extrémisme :
est-il condamné à l'u-topie ? Se place-t-il cruellement dans la réalité la
plus extrême et pesante de leur échec, ou dans la virtualité métaphysique d'une
négativité absolue constamment postulée ? Dans la complicité des deux, et
leur incapacité à les penser au-delà de leur compulsion à insulter et menacer
de mort tout ce qui existe (l'auteur en sait quelque chose ; une théorie
des jeux illustré de couteaux divers dans leur dernier numéro lui était
probablement destinée) ? Malgré leur mépris pour la littérature, n'est-ce
pas d'une déchéance littéraire
qu'ils furent sanctionnés, — au sens où nous ne pouvons plus lire leurs textes
en vertu d'une quelconque réalité historique déterminable, mais bien dans
l'interrogation des limites existant entre simulacre et réel, virtualité de la
guerre et factualité du meurtre, déterminiscence de l'ennemi et spectralisation
du rapport social qui permettrait la lutte ? Avons-nous là un jeu de
simulation jonglant avec la menace de mort concrète, prête à la donner bientôt,
mais n'ayant produit que le témoignage poétique d'une métaphysique époquale de l'économie de
la mort ?
[...]
Si le militantisme utérin des « féministes »
d'aujourd'hui est l'hypocrisie odieuse de l'extension cancéreuse de la publicité et de l'information comme seul
rapport social et humain, ce militantisme queutard de la permanente « pénétration »,
du « je t'encule » comme figure de style, est assurément beaucoup plus odieux encore :
« […] et
vous, pro-situs de mes deux, qui faites de la diffamation un tic ulcéreux, de
l'injure une rhétorique impuissante, confinés dans la cocotte minute de vos
trente-trois lecteurs cons,- vous, les éditorialistes miteux, à l'estomac aigri
par la mauvaise digestion de Debord, qui vous donne l'excuse, en en faisant un
Maurras de Gauche, de ne rien pouvoir penser, pas plus de « critique
sociale radicale » qu'autre chose, que l'enchaînement bande-mou de vos
formules creuse,- vous qui, en me croisant dans le dix-huitième ou dans une
soirée, barbichette anar et veste noire sur vos bras en jambons dodus,- vous
qui menacez de me casser la gueule sans pouvoir me regarder dans les yeux ou me
calomniez sans oser citer mon nom,- vous qui citez mon nom et voulez me mettre
par vos insultes à votre niveau,- vous êtes des menteurs, des poseurs et des
ennuyeux ; des crétins incapables de penser, des « révolutionnaires » incapable
de rien changer, des idéologues qui n'ont jamais su produire la moindre pensée. »
Toute cette démesure, et ils n'ont
généré que des singes
; toute cette contorsion des chantages à la culture, et ils ne produisent que
des perroquets ;
toute cette volonté de « subvertir », et nous n'entendons que des ventriloqués : « réaliser
le dépassement du nihilisme », prononcent hardiment les bouffons, tout en
prétendant « dire le réel » — mais qu'est-ce qu'époqualement la « ligne
du nihilisme » sauf la limite d'achoppement de leur « réel » ?
Croyant réaliser dans la « négativité » bien phrasée leur être, ils
sont niés dans l'être, comme constellation
de ce qui est : ce « nihilisme » qui réfléchit leur
médiocrité.
[...]
Mais il ne faut pas y voir [à propos
de la récupération], comme ces imbéciles d'éditorialistes, n°1 de la
récupération situe, pétrifiés dans les tics de l'extase debordienne, comme les
habitants de Pompéi par la lave, prêts à dénoncer partout la « récupération »,
une faiblesse, mais bien la seule chance historique de cette génération abrutie
par les deux dernières décennies.
[...]
Ils instituent un microtribunal, très
kantien bonsaï, compétent à juger de tout ce qui existe ; ils croient que la
mort de Dieu laisse un poste vacant
où on peut s'installer pour juger sommairement de tout. Les manœuvres misérables et les
procédés haineux de ces pseudo-révolutionnaires, où ils pataugent sans fin, sont l'identité entre cette théorie et
les corps qui la pensent.
Plus encore que dans ses tentatives de
succession et de relève, des plus rigoureusement fidèles à son projet « clandestin »
(la Bibliothèque des Émeutes, l'Encyclopédie des Nuisances, les Archivistes de
la Subversion, les Petits Pédagogues du Mal, etc.), aux récupérations si
bouffonnement antinomiques au concept qu'elles récupéraient qu'elles ont
recruté leurs propagateurs dans les catégories les plus parvenues de l'« industrie
de la consolation », divertissement et information, journalisme « branché »
(à la synchronie, au rituel ennuyeux des « émissions » en temps réel)
et idéologues de l'incapacité à penser, comme autant de figures de la
résolution dialectique par
transparence (et la dialectique prise dans clôture
politico-époquale de la synchronie, se
réalise synchroniquement et résout toutes les anti-thèses dans ces syn-thèses
vides que sont les cadavres trans-parents de l'information) —
davantage, donc, que dans ces héritages, l'échec politique était déjà l'échec poétique de l'idéologie
situationniste.
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