dimanche 9 février 2014

Debord et Nougé / 8



Comme on le voit, je ne suis pas le seul à rattacher Debord à Nougé. Jérôme Duwa a écrit un livre qui s’intitule : Surréalistes et situationniste, Vies parallèles ; on pourrait tout à fait en écrire un sur les vies parallèles de Nougé et Debord qui rendrait au premier ce que le second lui a pris — consciemment ou non — ; ce qui ne serait que justice.

En attendant, on peut continuer à donner des citations qui vont toutes dans ce sens :

« Paul Nougé (1895-1967), forte tête du groupe surréaliste de Bruxelles, qui a fait de la réécriture la clé de voûte de son activité poétique, est l’héritier d’une tradition de remise en question de la littérature et l’art en général, tradition qui se réclame d’Isidore Ducasse, plagiaire désormais prestigieux. Nougé s’inscrit dans ce courant de pensée qui a marqué son époque et la nôtre, celui du renversement de perspective qui veut abolir l’art pour le réaliser dans la vie. »

Correspondance, revue-tract lancée en 1924 par Nougé avec Camille Goemans et Marcel Lecomte : « [I]l s’agit d’une entreprise — confidentielle — de réécriture  à travers laquelle les trois complices s’installent dans la pensée et dans les phrases d’un auteur pour les gauchir légèrement et leur imprimer la légère distorsion qui fait toute la différence, celle qui “efface l’idée fausse, la remplace par l’idée juste”. Il est d’ailleurs significatif que le numéro hors-série de Correspondance du 10 juillet 1925 s’intitule “Éloge de Lautréamont”. »

« […] bien qu’elles ne portent pas le nom de détournement, les réécriture pratiquée par Nougé n’en sont pas moins parfaitement conscientes et tout à fait systématiques. Dès le début de l’aventure de Correspondance, Nougé a détourné, plagié, imité, collé toutes sortes de productions écrites, depuis les exercices d’un obscur manuel de conjugaison (Quelques écrits de Clarisse Juranville), jusqu’aux exemples d’un dictionnaire franco-russe (Un miroir exemplaire de Maupassant), en passant par une pièce de théâtre de Jean Cocteau (Le dessous des cartes), des poèmes de Baudelaire (La géante, L’amoureuse infidèle), des publications littéraires récentes (les tracts de Correspondance), mais aussi et surtout des productions non littéraires, qu’il s’agisse de proverbes et d’expressions toutes faites, de chansons, d’anecdotes, de fables ou encore de textes publicitaires. »

« Aux références théoriques et aux sources d’inspiration en grande partie semblables, il faut ajouter les liens étroits qui unissent le groupe de Bruxelles et les situationnistes. Il est aisé de discerner ces liens en feuilletant le bulletin lettriste Potlatch et la revue Les lèvres nues, dirigée par Marcel Mariën […]. Les deux revues paraissent à peu près en même temps […]. Dans Potlatch, les allusions à la Belgique et au groupe belge sont nombreuses : réponse à une enquête du groupe surréaliste belge (n° 5), extraits de la revue Les lèvres nues (n° 4, n° 21), compte rendu d’actions menées par les surréalistes belges (n° 26), annonce des collaborations lettristes ç la revue belge (par exemple, n° 26 : “Tout savoir sur la dérive. Lisez Les lèvres nues”). Plusieurs articles font aussi état de la situation en Belgique (n° 20) et témoignent des rapports fréquents qui existent entre les lettristes et les Belges. En outre toutes les allusions au groupe surréaliste belge sont positives, alors que les surréalistes français y sont immanquablement maltraités. Signalons que l’Internationale lettriste a été fondée en Belgique et que plusieurs Belges ont fait partie de l’Internationale situationniste, le plus connu étant Raoul Vaneigem. »

« À la série d’exemples qui vient d’être citée — et qui prouve bien l’étroitesse des liens qui unissaient lettristes et surréalistes belges —, on pourrait encore ajouter quelques preuves de l’influence, sans doute indirecte, exercée par Nougé. Ses textes parus dans Les lèvres nues ont presque tous été rédigés antérieurement et sont publiés de la propre initiative de Marcel Mariën. Cependant les articles lettristes se voyaient souvent encadrés d’aphorismes et de poèmes nougéens, par conséquent, même si ces derniers n’avaient pas connu précédemment l’auteur de Correspondance — ce qui paraît bien improbable —, ils n’auraient pas manqué de s’intéresser dès lors  à ce maître ès détournement qu’est Nougé. »

« Les situationnistes, quant à eux, publient leur propre revue à partir de juin 1958 et l’on peut s’étonner qu’ils y passent cet héritage sous silence, alors qu’ils revendiquent leur filiation “critique” avec le surréalisme d’André Breton. […] On pourrait peut-être avancer l’explication d’une filiation trop directe, sachant qu’un mouvement d’“avant-garde” se définit davantage par la négation et la contradiction que par la continuité, surtout directe. »*

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* Les citations précédentes viennent d’un article de Geneviève Michlel intitulé : Le détournement de Paul Nougé aux situationnistes ; on peut le lire intégralement à l’adresse suivante :



(À suivre)

6 commentaires:

  1. « Comme on le voit, je ne suis pas le seul à rattacher Debord à Nougé.» Décidément, vous êtes un rigolo prétentieux ! vos billets ne sont que compilation de citations d'ouvrages écrits par d'autres, et vous voilà affirmant sans crainte du ridicule que vous n'êtes pas le seul à penser comme eux !
    Mais puisque vous parlez de détournement, parlons un peu de citation :
    le détournement est le contraire de la citation, de l'autorité théorique toujours falsifiée du seul fait qu'elle est devenue citation ; fragment arraché à son contexte, à son mouvement, et finalement à son époque comme référence globale et à l'option précise qu'elle était à l'intérieur de cette référence, exactement reconnue ou erronée.
    Non, Lucarnul, vos compilations de citations ne font pas illusion et votre forfanterie nous fait marrer.

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    1. Vous n'êtes qu'un malheureux imbécile satisfait. Bonne continuation — creusez l'expression.

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    2. Mettez-vous au moins d’accord avec vous-même : quand je ne fais pas de commentaires à vos billets, vous vous en inquiétez (voir billet précédent) et lorsque j’en fais, ils ne vous conviennent pas.

      Vous compilez les écrits des autres sur Debord et vous poussez la vantardise jusqu’à affirmer que ceux-ci sont en accord avec vous !
      Tout le monde peut bien se moquer de votre faramineuse prétention.

      (Vous avez lu une fois sous la plume de Jaime Semprun «creusez l'expression» et depuis vous répétez cette formule à tout propos et hors de tout propos : ce n'est pas très malin.)

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    3. Mon petit Alex. Vous êtes un imbécile. D’abord, vous ne savez rien et vous voyez moins encore : vous vous trompez d’adresse. Ensuite, vous continuez à scier en tortillant du fion. Vous ne faites que répéter. Bref, vous enfilez des perles — mais vous n’êtes pas franc du cullier. Attention ! Ne creusez pas trop quand même, vous pourriez vous faire du mal (essayez le baume du Pérou au cas où le cacao de Cuba ne vous soulagerait pas).

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    4. P.-S.
      Mais vous savez ce qu’on dit : il n’y a que le premier pet qui prout vraiment ; après ça descend tout seul. Bonne continuation.

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    5. P. P.-S.
      Ne vous offusquez pas : ce n’est qu’un juste retour des choses ; vous m’avez assez « fait chier » — tâchez d’« écrire propre ».

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